L’ouvrage de Jules Dejerine et Emmanuel Gauckler « Les manifestations fonctionnelles des psychonevroses. Leur traitement par la psychotherapie », paru chez Masson en 1911, l’annee de sa prise de fonction de la… Click to show full abstract
L’ouvrage de Jules Dejerine et Emmanuel Gauckler « Les manifestations fonctionnelles des psychonevroses. Leur traitement par la psychotherapie », paru chez Masson en 1911, l’annee de sa prise de fonction de la chaire de Jean-Martin Charcot, est un veritable traite de psychopathologie et de psychotherapie, a travers l’etude clinique des manifestations physiques fonctionnelles. Il comporte trois parties : – l’etude analytique des manifestations fonctionnelles, concerne les « troubles et symptomes persistants accuses par les nevropathes et se creant chez ces malades en dehors de toute lesion somatique antecedente », dans les differents appareils : digestif, urinaire, genital chez l’homme et chez la femme, respiratoire, cardiovasculaire, manifestations cutanees, appareil neuromusculaire, troubles diffus ou localises de la sensibilite, des organes des sens, manifestations nerveuses et psychiques proprement dites, troubles du sommeil, cephalees, troubles des reflexes, etc. A l’aide de multiples vignettes, voire de veritables observations cliniques, il aborde ainsi de maniere precise et fine tout ce champ ; – dans l’etude synthetique des psychonevroses, Dejerine met l’accent sur l’importance de l’emotion et de l’emotivite et leur role dans la genese des psychonevroses ; ainsi parle-t-il des excitations emotives d’origine exterieure, de l’emotion choc et des excitations emotives d’origine interieure. Les psychonevroses sont representees essentiellement pour lui d’une part par la neurasthenie et d’autre part par l’hysterie. Il est interessant d’ailleurs de noter qu’il met la description de la psychasthenie faite a cette epoque-la par Janet hors du champ des psychonevroses. Voici ce qu’ecrit Dejerine a la fin de son ouvrage : « Nous dirons : toutes les fonctions peuvent etre troublees par l’intervention illegitime du psychisme. Ainsi se creent les manifestations fonctionnelles ; – cette intervention du psychisme a dans la presque unanimite des cas une cause emotive pour origine – l’emotion peut agir par actions repetees, elle cree alors la neurasthenie, syndrome de preoccupation emotive – l’emotion peut agir par action brutale de dissociation, elle a pour consequence, dans ces conditions, l’accident hysterique. L’emotion n’agit pour creer la psychonevrose et leur accident que sur terrain emotif. Mais alors que l’eventuelle neurasthenique est essentiellement un obsedable, l’hysterique, par definition, est un instable et un incoordonne. Si pour leurs phenomenes secondaires, les psychonevroses peuvent admettre des therapeutiques variees, elles ne reconnaissent qu’un seul traitement pathogenique, a savoir la psychotherapie. Notons que Dejerine fait tres peu de place aux representations mentales non conscientes dans la genese des troubles ; – il n’y a qu’une seule psychotherapie legitime, a savoir la psychotherapie par persuasion qui doit s’adresser a la fois aux accidents et au fond mental et moral qui leur a permis de s’etablir. Dejerine met l’accent sur l’importance de la confiance qu’a le patient a l’egard de son medecin. Ce n’est que grâce a la qualite de la relation au medecin (le transfert ?) et de la disponibilite et persuasion de celui-ci que le traitement peut se faire reellement. L’isolement n’est qu’un moyen pour la realisation des conditions exterieures au travail psychotherapeutique du medecin ; il peut d’ailleurs etre tres variable, de meme le repos et la suralimentation. Nous savons tous que c’est au sein de la Salle Pinel que Dejerine et Gauckler aides par toute une equipe d’internes, d’infirmieres ont realise ce travail therapeutique. « Nous leur donnons envie de se guerir, mais c’est par eux-memes qu’ils se guerissent » ( Fig. 1 ). Notons la remarque de Dejerine : « c’est deliberement que nous negligerons l’etude de la psycho-analyse, la methode de Breuer-Freud (Etudes sur l’hysterie, 1895) ; si elle peut offrir un certain interet au point de vue psychologique, elle nous parait, dans ses applications therapeutiques, presenter d’incontestables dangers. Quant aux conclusions tirees de cette methode – origine genitale – (plutot sexuelle d’ailleurs ! ?) des psychonevroses, elles ne nous paraissent pas admissibles, et nous avons pense qu’elles ne devaient pas trouver un echo ici ». Il est evidemment aussi interessant, tout au long de la lecture de ce remarquable ouvrage, de voir comment ceux qui ont utilise et utilisent l’hypnose font l’objet de remarques parfois bien critiques, pour reunir a la fin d’un certain point de vue Charcot et Dejerine a travers un des tout derniers articles de Charcot : « c’est la foi qui guerit » et une remarque de Dejerine a la fin de son avant-propos : « c’est ici ou jamais le cas de rappeler l’eternel adage : c’est la foi qui sauve… ou qui guerit ».
               
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